Congo : 2 milliards de F. CFA au centre d’une polémique de pratiques frauduleuses à la direction générale des impôts et des domaines

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Pendant que les textes en vigueur sont mis en place pour faire respecter et appliquer la loi, cela ne semble pas convenir à certains. Dans une note signée le 29 avril 2021, le directeur général des impôts et  des domaines demande au directeur général de la Banque postale du Congo un virement d’une somme de 2 milliards pour le compte d’un notaire. Une pratique qualifiée de ‘’frauduleuse’’ par quelques experts du domaine.

« Par le débit du compte de la Direction Générale des Impôts et des domaines numéro : 30019 10001 10832470001 83, ouvert dans les livres de la Banque Postale du Congo, je vous demande de virer la somme de deux milliards (2.000.000.000) FCFA en faveur de l’Office Notarial Note, compte numéro : 30019 10001 10842280008 56, ouvert dans les livres de la Banque Postale du Congo », tel est le contenu de ladite note.

Le motif justifiant ce virement est l’acquisition d’un bien devant abriter l’hôtel des impôts de Brazzaville.

Pour la petite histoire, pour  diversifier l’économie et les recettes congolaises, et lutter contre les détournements, le gouvernement via le ministère des finances s’attelle à la sécurisation et l’amélioration des recettes fiscales de l’Etat. Ainsi, le premier ministre honoraire, Clément Mouamba avait procédé au lancement des travaux de modernisation des régies financières par la pause de la première pierre, à Sibiti, dans le département de la Lékoumou, le 10 février dernier. Il s’agit de construire 10 hôtels des impôts au Congo dotés d’équipement de qualité et répondant aux exigences liées à l’informatisation des régies financières et à la digitalisation  des services. 

S’agissant de cette demande et de la construction de ce bâtiment, une seule question se pose : où est le marché dûment signé et enregistré ?

Dans la réalisation de ce projet, la DGID n’est pas ordonnateur, sauf en matière de la part des pénalités lui revenant. Pour un tel montant, il faut un marché de travaux signé par les autorités compétentes car la DGID n’est pas une structure autonome. Le décret n°2009-162 du 20 mai 2009 fixant les seuils de passation, de contrôle et d’approbation des marchés publics dispose en son article 10 : « les marchés publics faisant l’objet d’un appel d’offres national correspondent aux seuils ci-après : pour les marchés de travaux et fournitures : marchés de valeur supérieure ou égale à cinquante millions (50.000.000) francs CFA… » 

« Ce compte est sous le ministre en charge des finances. Un directeur général ne peut autoriser un mouvement quelconque de ce compte, car la loi interdit les administrations publiques d’avoir un compte dans une banque », déclare un expert des impôts.

 Aussi, cette procédure utilisée est illégale, car poursuit-il : « l’article 13 du Décret n°2011-843 du 31 décembre 2011 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n°2009-162 du 20 mai 2009 fixant les seuils de passation, de contrôle et d’approbation des marchés publics dispose : Les personnes morales de droit public ou de droit privé, prévues dans le code des marchés publics comme maître d’ouvrage, délèguent leur maîtrise d’ouvrage à la délégation générale des grands travaux pour la passation des marchés publics dont la valeur estimée est supérieur ou égale à : un milliard (1.000.000.000) de francs CFA pour les marchés de travaux… »

Du moment où la somme demandée est de 2 milliards et qui est supérieure à 1 milliard, l’on peut donc déduire que la maîtrise d’ouvrage revient  à la délégation générale des grands travaux.

Dans la réalité des faits, la Banque Postale ne devrait pas exécuter ce virement. Parce que, les marchés publics sont quel que soit leur montant, soumis à l’approbation de l’autorité compétente. Cette dernière relève exclusivement de la compétence du président de la République ou du ministre chargé des finances, selon les cas, quel que soit le maitre d’ouvrage adjudicateur concerné.

 « Le marché signé est approuvé par le président de la République, lorsque son montant est supérieur ou égal à deux milliards (2.000.000.000) de francs CFA ; le ministère chargé des finances, lorsque son montant est inférieur à deux milliards (2. 000.000.000) de francs CFA », dixit l’article 18 du Décret n°2011-843 du 31 décembre 2011 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n°2009-162 du 20 mai 2009 fixant les seuils de passation, de contrôle et d’approbation des marchés publics.

L’on se souvient de Christian Roger Okemba, ancien maire de Brazzaville, qui avait demandé un virement dans un compte privé appartenant à sa fille et qui a été condamné pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêt ou d’avantage dans un acte. Selon le principe d’égalité devant la loi, il n y aurai pas jurisprudence ? On attend donc voir la suite.

Par Ronidezh Gantsuise